22 octobre 2002 - Dans un article édité la semaine dernière par Haaretz, Amira Hass dresse un inventaire des arguments israéliens qui justifient les actes les plus criminels de larmée israélienne, tandis que tout acte de résistance des Palestiniens est systématiquement présenté comme du terrorisme.
Il y a toujours un combattant, toujours un terroriste -
Voilà les règles de la guerre telles quelles se sont développées depuis deux ans.
Un palestinien est un terroriste quand il attaque des civils israéliens de part et dautre de la Ligne Verte en Israël et dans les territoires (occupés) et quand il attaque des soldats israéliens aux portes dune ville palestinienne. Un Palestinien est un terroriste quand une unité de larmée fonce dans son quartier avec ses tanks, et quil tire sur un soldat sorti de son char, et cest encore un terroriste quand il est touché par le tir dun hélicoptère et quil tient son fusil. Les Palestiniens sont des terroristes, quils tirent sur des civils ou sur des soldats.
Le soldat israélien est un combattant quand il tire un missile depuis son hélicoptère ou un obus depuis son tank sur un groupe de gens rassemblés à Khan Yunis, après que le combattant ou lun de ses pairs ait tiré un obus ou envoyé un missile contre une maison doù larmée prétend quune roquette Quassam est partie et tue un homme ou une femme. Cest un combattant quand il a affaire à deux palestiniens armés . Le soldat israélien tue des gens armés comme il tue des civils, enfants de la maternelle ou vieillards dans leurs maisons. Plus précisément, ils sont visés par les tirs de larmée israélienne de défense.
Les services de sécurité et les autorités légales pourchassent le palestinien terroriste. Des milliers de Palestiniens sont arrêtés et interrogés pour obtenir des informations sur un seul homme. Cest la guerre, mais les Palestiniens ne sont pas arrêtés en tant que prisonniers de guerre, qui sont exemptés dinterrogatoire et de procès. Leurs noms sont connus, chaque détail de lenquête et les rapports daccusation les concernant sont publics et peuvent être publiés. Sil arrive quune vague enquête établisse quun soldat israélien a failli (par exemple, il a tué ou utilisé ses armes inconsidérément, ou il a pillé, ou maltraités des gens aux check points) son identité reste inconnue. Dans des centaines dautres cas larmée déclare "nous navons pas connaissance de cette plainte". Dans des milliers dautres, personne ne prend la simple peine de poser des questions à larmée israélienne.
Des milliers de Palestiniens sont arrêtés et mis dans des centres de détention. Israël est un Etat de droit, mais il leur réserve un châtiment plus sévère encore quune privation de liberté : il leur interdit la visite de leur famille avant leur procès.
Des douzaines de terroristes ont été accusés et condamnés à mort sans même avoir bénéficié dun procès. Cest la légitime défense telle que la pratique un Etat de droit attaqué par une entité terroriste. Des milliers dIsraéliens sont impliqués dans ces exécutions extra-judiciaires et en sont félicités. Alors quon ne se prive pas de faire remarquer que des Palestiniens tuent de manière honteuse des collaborateurs présumés, sans procès ou après des procès irréguliers.
On attend des Palestiniens quils obéissent aux ordres militaires émis par lEtat dIsraël comme sil sagissait des lois dun Etat palestinien. Mais lEtat qui impose ces ordres et dont larmée contrôle les territoires, la terre, les ressources en eau, nest pas responsable du bien-être des Palestiniens qui vivent dans ces territoires. Il na pas besoin de se comporter en Etat normal puisque les Palestiniens sont des citoyens privés du droit de vote. Il na pas besoin de se comporter en puissance occupante, puisque les accords dOslo lont exonéré de ce titre (aux yeux du monde en tout cas), en permettant de faire passer le contrôle de plus de 90% de la population palestinienne sous le contrôle administratif de lAutorité Palestinienne. LAutorité Palestinienne est devenus responsable de cette communauté alors même quon lui refusait toute autorité sur la plus grande partie de la Cisjordanie et quil lui était impossible de faire passer la moindre canalisation deau sans lautorisation de lAdministration civile. LAutorité Palestinienne est toujours responsable du bien-être et de la sécurité des Palestiniens, alors même que ses institutions ont été bombardées et détruites que les tanks et hélicoptères contrôlent toute la région, à lintérieur comme à lextérieur.
Les terroristes, selon la propagande israélienne, mettent la population civile en danger quand ils se cachent en son sein, si bien quon ne peut pas blâmer larmée israélienne quand des civils sont tués dans leurs foyers. Les combattants avec leurs armes personnelles et leurs tanks ne sont que des hôtes de passage dans les colonies et les avant-postes, et tirent sur des civils palestiniens qui seraient exploités par les terroristes.
Les Palestiniens, entend-on, sont assoiffés de sang et nont quune ambition : la revanche. Ce que prouvent toutes les manifestations et les sondages qui confirment le soutien des Palestiniens aux attaques (terroristes). Les Israéliens que les sondages ont montrés daccord avec lassassinat de Salah Shehadeh bien quil ait entraîné la mort de civils palestiniens, ne sont jamais assoiffés de sang ni de vengeance.
Le Palestinien trouble lordre public quand il enfreint un couvre-feu imposé par les combattants dans leurs tanks et leurs jeeps blindées. Ce Palestinien mérite dêtre puni : dans le meilleur des cas, on envoie des gaz lacrymogènes, autrement, on tire. Le combattant israélien et son armée protègent lordre public et la sécurité quand ils empêchent des centaines de milliers denfants daller à lécole, les professeurs daller à leur travail, les malades darriver à lhôpital, le fermier daller à ses champs et les grands-mères de voir ses petits enfants.